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Les antidépresseurs

Dr Asquier Thierry25 février 2016

Généralités

Les traitements antidépresseurs font partie des thérapeutiques reconnues par le corps médical, comme ayant représenté une avancée majeure dans la prise en charge des pathologies cibles de ce type de molécules.

On pourrait penser que la dénomination « antidépresseur » correspondrait exclusivement à la cible privilégiée de cette classe médicamenteuse, à savoir les troubles dépressifs, ce qui, nous allons le voir, ne représentent pas la réalité.

En effet, ces médicaments psychotropes possèdent des indications thérapeutiques largement au-delà des états dépressifs majeurs, comme nous allons le détailler dans la suite de cet article.

Les effets thérapeutiques

Les effets thérapeutiques des antidépresseurs peuvent être regroupés schématiquement en cinq rubriques.

Tout d’abord une action sur l’humeur, que nous appellerons action antidépressive. Cette action sur l’humeur représente l’action cardinale, caractéristiques de l’ensemble des antidépresseurs quelques soit leur classe médicamenteuse. L’action sur l’humeur est essentiellement caractérisée par une stimulation, qui nécessite néanmoins un minimum de huit à 10 jours pour se signaler au mieux. Cette action antidépressive n’est donc pas immédiate, et nécessite par ailleurs plusieurs semaines (quatre à six semaines) pour être avérée ou au contraire pour affirmer son absence d’efficacité. La prise d’un antidépresseur, en dehors de certaines pathologies psychiatriques telles que les troubles bipolaires, ne s’accompagne pas d’euphorie, mais uniquement de stimulation de l’humeur dépressive.

Ensuite, une action sur l’anxiété, propriété anxiolytique qui se manifeste plus rapidement que l’action antidépressive, essentiellement sur l’anxiété pathologique dite de fond, et non pas sur la réaction anxieuse ou l’anxiété paroxystique. Cette action anxiolytique des antidépresseurs, plus ou moins importante selon le type de molécules, semble être corrélée à l’intensité des activités antihistaminiques et/ou Alpha Adrénolytiques.

Action de stimulation psychomotrice, pour certains antidépresseurs qui agissent essentiellement sur l’activité Dopamine. Seuls les antidépresseurs qualifiés de « psychostimulants » ont cette activité sur la stimulation psychomotrice.

Une quatrième action est représentée par l’activité de certains antidépresseurs sur le sommeil, tant sur le plan qualitatif que quantitatif. L’action de ces antidépresseurs qualifiés de « sédatifs », améliorant l’endormissement, peut être tout à la fois un effet bénéfique (mais néanmoins secondaire) que négatif en raison d’une possibilité d’extension de la sédation à l’activité diurne le lendemain.

Enfin, certains antidépresseurs ont démontré une activité bénéfique antalgique, mais pour la plupart à des doses inférieures aux doses antidépressives usuelles.

Indications des antidépresseurs

Bien dit bien évidemment, l’indication principale des antidépresseurs est représentée par les états dépressifs également appelés dépressions.

La totalité des états dépressifs, impose la mise en place d’un traitement antidépresseur, variable selon la typologie particulière de ces états dépressifs et l’existence ou pas d’une comorbidité organique. Il s’agit de traitement véritablement curatif, dont l’intérêt au titre de la prévention des récidives étant encore à l’heure actuelle sujette à caution. La fonction essentielle de l’antidépresseur est représentée par une accélération du processus de guérison par rapport à l’évolution naturelle de la maladie dépressive. Bien entendu, le choix de l’antidépresseur sera déterminé en connaissant les modalités d’action de tel ou tel antidépresseur, variable selon les molécules, en choisissant la meilleure efficacité et la meilleure tolérance possible.

Le choix sera également déterminé par l’existence d’une symptomatologie annexe (anxiété, activité délirante), et de l’usage favorable d’éventuels effets secondaires (stimulation psychomotrice, sédation) qui pourraient s’avérer bénéfiques selon le type de dépression.

Ainsi les antidépresseurs seront indiqués dans : les États dépressifs majeurs, les mélancolies, les dépressions agitées, les dépressions anxieuses, les dépressions bipolaires, les dépressions organiques.

Les antidépresseurs peuvent être également utilisés à quasiment tous les âges de la vie, au prix bien entendu d’une surveillance et d’une adaptation de la posologie, plus particulièrement aux extrêmes de la vie.

Comme nous l’avons évoqué lors de l’introduction, les états dépressifs ne représentent pas les seules indications intéressantes pertinentes des antidépresseurs. D’autres affections psychiatriques peuvent bénéficier d’une efficacité manifeste de ce type de traitement. Il s’agit de :

  • Le trouble panique ;
  • L’agoraphobie ;
  • Le TAG ou trouble anxieux généralisé ;
  • La phobie sociale ;
  • Les TOC ;
  • L’état de stress post-traumatique ;
  • Certaines maladies psychosomatiques, essentiellement sur les composantes anxieuses et dysphoriques ;
  • La fibromyalgie ;
  • Certaines addictions en particulier alcooliques ou toxicomaniaques ;
  • Certains troubles des conduites alimentaires, lorsque celles-ci sont surchargées par des affects dépressifs.

L’intérêt de certains antidépresseurs peut également dépasser le cadre de la psychiatrie, et pourrait être utilisé de façon bénéfique dans d’autres spécialités médicales, concernant des pathologies somatiques. En particulier, on peut être amené à proposer certains antidépresseurs en neurologie pour le traitement de certaines céphalées, voire même dans certaines migraines. Il s’agit essentiellement du groupe des antidépresseurs tricycliques, qu’il ne faut envisager que comme un traitement adjuvant, et souvent à des posologies moindres que la posologie antidépressive.

Il existe un cas particulier concernant la maladie de Parkinson, très fréquemment associée à un état dépressif, dont l’usage des antidépresseurs ne pourra s’envisager qu’en deuxième intention, dans le cas d’un échec de la Dopamine sur cette « dépression parkinsonienne ».

Parmi les autres indications neurologiques pouvant concerner la prescription d’un antidépresseur, il existe certains syndromes douloureux comme par exemple les douleurs neuropathiques, les douleurs post-zostériennes, ainsi que certaines douleurs d’origine néoplasique.

Enfin, on a pu proposer certains antidépresseurs pour faciliter le sevrage tabagique, d’une efficacité néanmoins toute relative.

L’importante diversité des classes thérapeutiques retrouvées chez les antidépresseurs, empêche de définir très précisément les champs d’action mais également les effets secondaires et pour certains négatifs de ce type de molécules. Si les premiers antidépresseurs étaient marqués par une tolérance modeste, avec de nombreuses contre-indications, les nouveaux antidépresseurs sont à l’inverse caractérisés par une relative bonne tolérance, ce qui a pu faire penser un temps à de véritables « pilules du bonheur inoffensives ». Bien entendu il n’en est rien, ces molécules chimiques demeurent des traitements médicamenteux imposant une prise en charge et un suivi médical. La diversité d’action de ces traitements médicamenteux pourrait également suggérer l’usage des antidépresseurs, de façon fantaisiste, pour des indications médicales voire non médicales (perte de poids, éjaculation précoce, stimulation cognitive).

Conclusion

La mise sur le marché, depuis le premier antidépresseur en 1949, de multiples autres molécules antidépressives a permis des améliorations majeures dans le domaine de la santé mentale, et tout particulièrement dans la prise en charge des troubles dépressifs et anxieux.

Comme souvent, cet engouement renforcé par une efficacité avérée, s’est rapidement heurté à des oppositions farouches pour l’usage de ces traitements médicamenteux, mais aussi à des usages exagérés pour des indications parfois mal appropriées.

Les bénéfices attendus dans les multiples indications de ces traitements imposent la bonne compréhension des enjeux thérapeutiques de cette chimiothérapie dans les bénéfices demeurent aujourd’hui très clairement prédominants.

Crédit photo

Image par Pexels de Pixabay

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