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La Sismothérapie

Dr Asquier Thierry15 mars 2019

Généralités

La sismothérapie, également dénommée électro convulsivothérapie (ECT) ou plus trivialement « électrochocs », est encore largement sous-utilisée, malgré des preuves paradoxalement très anciennes de son efficacité dans certaines pathologies psychiatriques.

On peut bien entendu y voir l’impact d’une médiatisation péjorative de cette authentique thérapeutique, se voyant affublé de « traitement barbare », « stratégie thérapeutique d’un autre âge »…. caricaturée lors d’un célèbre film, magnifique par ailleurs.

Les législateurs ont par ailleurs grandement compliqué l’usage de cette technique, renforçant le consentement éclairé par une obligation écrite d’accord familial pour sa réalisation effective chez le patient.

Faisons donc le point aujourd’hui sur cette technique thérapeutique qui demeure d’actualité, et même qui a vécu de significatives améliorations en particulier sur le plan de la tolérance et des effets secondaires.

Indications

L’indication majeure des ECT est représentée par la « les états dépressifs majeurs sévères de type mélancolique » avec une efficacité à court terme largement supérieure à l’ensemble des Antidépresseurs.

Mais si cette indication représente l’intérêt majeur de ce traitement, elle n’est pas unique. En effet, plusieurs autres indications sont aujourd’hui largement retenues :

  • Les dépressions résistantes en troisième ou quatrième intention ;
  • Les dépressions sévères, en particulier chez le sujet âgé de plus de 60 ans ;
  • Le traitement de maintenance des états dépressifs ;
  • Les Schizophrénies et les dépressions psychotiques ;
  • Les dépressions bipolaires et unipolaires (dites récidivantes) ;
  • Les dépressions organiques, en particulier dans le cadre de la maladie de Parkinson.

Contrairement à ce qu’il est souvent répandu, les ECT ne sont pas contre-indiqués lors de la grossesse et non pas d’effet tératogène sur le fœtus, même si nous le rappelons, cette sismothérapie ne pourra s’envisager qu’après avoir évalué précisément le rapport bénéfice risque, et sous surveillance obstétricale si celle-ci est pratiquée lors du troisième trimestre de la grossesse.

Ainsi, la sismothérapie sera indiquée pour :

  • Son action antidépressive puissante et rapide dans des formes dépressives sévères ;
  • Sa relative bonne tolérance, surtout dans les situations dans lesquelles les psychotropes entraineraient des effets délétères plus préjudiciables comme chez les personnes âgées ;
  • L’existence d’antécédents de résistances aux psychotropes antidépresseurs ;
  • L’existence d’une réponse favorable à l’usage antérieur de la sismothérapie.

Bien entendu dans le respect de la volonté du patient et de sa famille.

Une indication particulière mérite d’être développée : il s’agit de l’usage des ECT comme traitement de maintenance des états dépressifs appelées « ECT-M ».

Il s’agit d’un traitement d’entretien par sismothérapie, administré aux patients ayant présenté plusieurs récidives, améliorés par une ou plusieurs cures de sismothérapie. Les modalités de réalisation impliquent plusieurs protocoles possibles, comme par exemple une à deux séances d’ECT hebdomadaires durant 6 mois, suivies par une séance d’ECT mensuelle une fois la stabilité de l’humeur acquise.

L’American Psychiatric Association détermine les critères suivants comme guideline des ECT-M :

  • Existence de récurrences dépressives ;
  • Patients ayant répondu à l’ECT curative à la phase aigüe ;
  • Patients résistants ou intolérants aux psychotropes antidépresseurs utilisés seuls ;
  • Choix du patient.

Réalisation pratique

La sismothérapie ne peut s’envisager que dans un établissement médical spécialisé, agréé pour cette technique, disposant d’une salle, de personnels et du matériel adaptés.

Cette technique ne peut s’envisager qu’avec un réanimateur présent au moment du traitement avec du matériel de réanimation à disposition.

Il s’agit essentiellement de provoquer des convulsions, en milieu médicalement sécurisé.

Si anciennement le courant délivré était de type sinusoïdal, au-delà du seuil épileptogène, permettant le déclenchement des convulsions à visée thérapeutique, il est actuellement largement préférable de privilégier les courants de type « bref » ou « ultra-bref (inférieur à 0.3 milliseconde) » pulsés à ondes carrées, dont l’impact, en particulier cognitif, est nettement atténué.

On envisage généralement en phase aigüe une douzaine de séances, à raison de 2 à 3 séances hebdomadaires, sachant qu’il n’y a pas lieu d’attendre véritablement des effets positifs avant la troisième voire quatrième séance.

Généralement les effets positifs sont manifestes aux alentours de la septième séance.

Un des inconvénients de cette technique réside dans son efficacité transitoire, responsable de très fréquentes rechutes précoces, imposant de fait soit un traitement antidépresseur par psychotrope en relais, soit un traitement de maintenance par ECT-M.

Conclusion

Malgré son ancienneté, ce traitement malheureusement très largement décrié, demeure pour certaines indications la pièce maitresse du traitement.

Certaines améliorations, en particulier techniques, par l’usage de courants « ultra-brefs » pulsés à ondes carrées a permis la quasi disparition des effets secondaires pénalisants, essentiellement représentés par des troubles cognitifs à type d’amnésie antérograde (c’est-à-dire de la mémoire à court terme).

Crédit photo

Image par NomeVisualizzato de Pixabay

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