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L’anesthésie

Dr Coester Denys19 novembre 2016

Généralités

Plus de 11,6 millions d’actes d’anesthésie sont réalisés chaque année en France métropolitaine et dans les Dom-Tom. En 1996, le chiffre s’élevait à 8 millions.

  • 9 millions concernent des patients de plus de 18 ans (hors accouchement) ;
  • 840 000 concernent des actes liés à l’accouchement ;
  • 930 000 concernent des patients de moins de 18 ans.

Les actes d’anesthésie effectués dans le cadre de chirurgies ambulatoires représentent 40% chez les adultes et 60% chez les enfants.

Une enquête de la SFAR (société française d’anesthésie réanimation) de 2010 a permis d’obtenir une cartographie chiffrée des actes d’anesthésie.

Les actes chirurgicaux nécessitant le plus un recours à l’anesthésie sont :

  • Les endoscopies à hauteur de 16,2% ;
  • Les accouchements, les césariennes et leurs complications, 8,3% ;
  • Les interventions sur le cristallin, 8,1% ;
  • Les affections de la bouche et des dents, 2% ;
  • Les libérations du canal carpien, 1,8%.

Les femmes sont plus représentées dans cette cartographie. 55% des actes d’anesthésie les concernent du fait de l’activité obstétricale et de leur longévité. Mais proportionnellement à leur nombre, les hommes de plus de 74 ans, ont un taux d’anesthésie annuel plus élevé.

Les actes d’anesthésie représentent une part importante des actes médicaux et ne sont pas des interventions anodines. C’est pourquoi, les mesures visant à limiter les risques et atténuer les effets secondaires ont été mises en place et continue à être développer.

Définition

L’anesthésie signifie « absence de toucher. (Préfixe « an » = sans. Suffixe « esthésie » = toucher)

En réalité, l’anesthésie a un rôle beaucoup plus important, car elle permet au chirurgien de pouvoir pratiquer des opérations très lourdes et potentiellement dangereuses, en toute sécurité.

L’anesthésie est pratiquée par un médecin anesthésiste-réanimateur, dont le but est de préparer une anesthésie adaptée au patient, le maintenir dans un état stable pendant l’intervention, mais également faciliter son rétablissement post-opératoire.

L’objectif de l’anesthésie est de nous plonger dans un état comparable au sommeil (anesthésie générale) ou de somnolence et de nous rendre insensible à la douleur par l’administration de produits anesthésiants.

Il existe une typologie d’anesthésie adaptée à chaque acte chirurgical :

  • Anesthésie locale ;
  • Anesthésie générale ;
  • Anesthésie loco-régionale.

Depuis quelques années, l’hypnose s’invite de plus en plus dans les salles d’opération et tend à être intégrée en complément de cette typologie.

Sa pratique facilite le travail du médecin anesthésiste, qui pourra alors administrer une anesthésie générale ou locale sur un patient parfaitement détendu.

Quelles sont les différentes formes d’anesthésie ?

Il existe différents types d’anesthésie, chacune étant utilisée dans le cadre d’un acte chirurgical précis à la discrétion du chirurgien et du médecin anesthésiste-réanimateur.

Anesthésie générale

L’anesthésie générale est un « état d’inconscience, de perte de mémoire, de soulagement de la douleur et de relaxation musculaire réversible provoqué par des médicaments »

L’anesthésie générale a pour objectif de plonger le patient dans un sommeil profond grâce à l’injection de médicaments ou de vapeurs anesthésiques via un masque, afin de bloquer la douleur et relâcher les muscles du patient. Elle est utilisée lorsque l’acte chirurgical porte sur un organe vital et pour une opération de longue durée.

Anesthésie locale

Contrairement à l’anesthésie générale, l’anesthésie locale n’entraîne pas de perte de conscience de la part du patient et est limitée à une zone du corps, ou à un organe.

Elle est souvent utilisée pour des interventions de courte durée.

Le produit anesthésiant est alors injecté directement dans les tissus à anesthésier ou par application d’une crème anesthésiante.

Elle peut être associée à une « sédation » ou à de l’hypnose.

Anesthésie péridurale ou loco-régionale

L’anesthésie loco-régionale ou péridurale permet d’endormir une région du corps et n’entraîne donc pas de perte de conscience pour le patient. Elle peut aussi être associée à une sédation ou à l’hypnose. Selon la région à opérer les injections se font soit au niveau du dos, de l’aine, de l’aisselle ou du haut du bras.

L’anesthésie péridurale est la plus connue, car pratiquée notamment pour les accouchements pour bloquer les nerfs de la moëlle épinière. Une anesthésie locale est pratiquée juste avant, afin de rendre l’injection indolore.

L’anesthésie loco-régionale permet un rétablissement plus rapide du patient, du fait de l’absence de perte de conscience du patient.

Anesthésie locale, régionale ou générale ?

Dans de nombreux cas, le choix de l’anesthésie se fait automatiquement par le médecin anesthésiste-réanimateur au regard de l’opération.

L’anesthésie générale est automatiquement choisie dans le cas d’opérations lourdes et longues, ou quand l’intervention porte sur un organe vital.

La chirurgie locale est préférée dans le cadre de chirurgies dites ambulatoires, pour lesquelles le patient peut sortir dans la journée. Le choix d’une anesthésie locale ou régionale permet un rétablissement plus rapide du patient, puisqu’il n’y a pas une de perte de conscience.

Les dentistes et les dermatologues ont souvent recours à l’anesthésie locale pour l’extraction d’une dent ou d’un grain de beauté par exemple.

En revanche, dans certains cas, pour certains actes chirurgicaux la question se pose.  Quand le choix est possible, le dialogue est alors mis en place entre patient, chirurgien et anesthésiste.

Le choix se fait alors lors de la consultation pré-opératoire et repose sur trois critères principaux :

  • selon le type d’acte chirurgical (mineur ou pas, hémorragique ou non) ;
  • selon la zone du corps concernée ;
  • selon l’état de santé du patient et ses antécédents médicaux.

Si le choix est possible, il est préférable de favoriser l’anesthésie locale pour limiter les risques cardiovasculaires et permettre un rétablissement beaucoup plus rapide qu’avec une anesthésie générale.

Comment se déroule une anesthésie ?

Avant toute anesthésie générale, ou loco-régionale, le patient doit systématiquement consulter un médecin anesthésiste-réanimateur.

Cette consultation est nécessaire dans le choix du type d’anesthésie, mais également afin de préparer l’intervention pour limiter les risques au maximum.

Une anesthésie se déroule en trois étapes principales :

  • rendez-vous pré-opératoire ;
  • pendant l’intervention ;
  • le suivi post-opératoire.

La consultation pré-anesthésique

Sauf en cas d’urgence, la consultation pré-anesthésique est obligatoire avant toute anesthésie. 48 heures avant l’intervention au minimum.

Lors de cette consultation le médecin anesthésiste-réanimateur procèdera à un examen clinique complet, pour recueillir des informations sur l’état de santé du patient et mettre en place une prise en charge adaptée et personnalisée.

L’examen clinique repose sur des facteurs liés :

  • à l’état de santé du patient ;
  • aux prescriptions médicales suivies ;
  • à ses antécédents médicaux, chirurgicaux, anesthésiques et allergiques.

Cette consultation est nécessaire pour rassurer le patient, l’informer des risques et effets secondaires éventuels et recueillir son accord écrit en connaissance de causes.

Le patient pourra également donner son accord écrit sur d’éventuelles mesures que le médecin anesthésiste pourrait prendre lors de l’intervention chirurgicale en cas de complications ou si une  transfusion sanguine est nécessaire.

Les résultats de l’examen, ainsi que l’accord seront ensuite conservés dans le dossier médical du patient.

Le médecin anesthésiste en profitera également pour informer le patient de quelques règles à respecter avant l’intervention :

  • ne pas fumer ;
  • être à jeun 6 heures avant l’opération (pour les solides et le lait). 2 heures pour l’eau ;
  • ne pas prendre de médicaments en dehors de la prescription médicale du médecin-anesthésiste ;
  • prendre une douche avec un produit antiseptique juste avant l’opération pour éviter toute contamination.

L’objectif de cette consultation est de cadrer au mieux l’anesthésie et d’envisager et d’informer le patient au sujet de tous les scénarios possibles, afin que tout se passe bien.

Pendant l’intervention

Dans le cadre d’une anesthésie générale, le médecin anesthésiste-réanimateur du patient est présent tout au long de l’intervention,  éventuellement secondé par un infirmier anesthésiste.

Il est présent pour maintenir l’état d’inconscience du patient, réagir si besoin en cas de douleur mais aussi d’adapter son travail en fonction du travail du chirurgien et des éventuels problèmes rencontrés au cours de l’intervention.

Pour procéder à l’anesthésie, il pose une perfusion chez le patient pour lui injecter un mélange de deux ou trois médicaments (sédatif, analgésique et si besoin un décontractant), grâce à un cathéter placé dans une veine.

Une fois le patient endormi et ses muscles relâchés, le médecin anesthésiste place un masque ou un tube dans la trachée relié à un respirateur pour aider le patient à respirer durant toute l’intervention.

Pendant l’intervention l’anesthésiste vérifiera le sommeil du patient, les battements de son cœur, sa respiration, sa température, le relâchement musculaire et sa coagulation.

Dans le cadre d’une anesthésie locale ou régionale, l’intervention est moins lourde et l’injection d’un produit anesthésiant ou l’application d’une crème sur la zone concernée suffise.

Suivi post-opératoire

A la fin d’une opération nécessitant une anesthésie générale, l’anesthésiste-réanimateur cesse d’administrer les produits hypnotiques au patient pour favoriser son réveil et des médicaments sont injectés afin de neutraliser l’effet paralysant du curare.

Le patient peut être réveillé en salle d’opération ou dans une salle de réveil.

Le tube est retiré de la gorge du patient, quand celui-ci est en mesure de pouvoir respirer seul.

Après leur réveil certains patients peuvent avoir du mal à bouger, une irritation de la gorge à cause de l’intubation ou quelques trous de mémoire, mais ces troubles disparaissent rapidement.

Pour une anesthésie locale, le rétablissement est plus rapide, mais l’intervention peut être fatigante et le patient peut quand même souffrir de confusion juste après. Mais l’effet disparaît rapidement.

Dans le cadre d’une anesthésie régionale, la récupération est progressive et peut prendre plusieurs heures.

Quels sont les produits anesthésiques utilisés pour une anesthésie générale ?

Les produits utilisés sont un mélange de produits permettant l’endormissement, l’insensibilisation à la douleur et un relaxant permet d’éviter les contractions musculaires.

Produits morphiniques ou sédatifs

Ils sont utilisés pour provoquer l’endormissement du patient et le maintenir dans un état d’inconscience pour éviter un réveil pendant l’opération.

Anti-douleurs ou analgésiques

Utilisés pour limiter au maximum la douleur, voire annuler totalement la sensation de douleur et les répercussions douloureuses dues à l’acte chirurgical.

Curares

Utilisés pour provoquer un relâchement musculaire et éviter les mouvements inconscients lors de l’opération afin de faciliter le travail du chirurgien.

Quels sont les risques liés à l’anesthésie ?

Dans toute intervention chirurgicale des risques existent, mais les risques directement imputables à l’anesthésie sont devenus de plus en plus rares.

La préparation lors de la visite pré-opératoire, l’encadrement par le médecin anesthésiste-réanimateur pendant l’intervention, le développement d’outils de contrôle de la douleur pendant et après l’opération, ont permis de réduire considérablement les risques liés directement à l’anesthésie.

Aujourd’hui, les accidents liés à l’anesthésie lors de l’opération sont dus à 3 facteurs principaux :

  • Risques liés à la pathologie elle-même ;
  • A la chirurgie ;
  • Les antécédents médicaux chirurgicaux du patient ;
  • Les allergies aux produits (même si cela reste rare).

Des effets secondaires peuvent apparaître, mais sont peu fréquents et les complications plus rares. Suite à une anesthésie, il arrive que certains patients aient :

  • des nausées ;
  • des vomissements ;
  • des lésions dentaires dues à l’intubation et à une mauvaise hygiène bucco-dentaire du patient ;
  • de la fièvre ;
  • des troubles musculaires ;
  • des trous de mémoire.

Le patient peut également faire une réaction allergique à certaines substances. Cette réaction peut devenir un choc anaphylactique (chute de tension, gonflement généralisé, voire arrêt cardiaque dans les cas les plus graves).

Mais les effets secondaires s’estompent rapidement et tout est mis en œuvre pour faciliter le rétablissement rapide des patients.

La sécurité de l’anesthésie s’est grandement améliorée, grâce à la préparation lors de la visite pré-anesthésique et aux outils de surveillance et de mesures de la douleur.

Outils de mesure de contrôle de la douleur pendant l’anesthésie

La prise en charge et la gestion de la douleur sont plus que jamais pris en compte par les médecins anesthésistes-réanimateurs afin que l’intervention chirurgicale soit la plus confortable possible.

Même si elle n’est pas consciente lors de l’intervention, l’anesthésie reste tout de même ressentie par le corps.

La prise en charge de la douleur pendant l’intervention est donc prise très au sérieux pour éviter des effets secondaires importants suite à l’intervention mais aussi permettre au patient de récupérer plus facilement après la chirurgie.

La mesure de la douleur est les médecins anesthésistes-réanimateurs se basent sur la pression artérielle et le rythme cardiaque. Mais cette mesure étant soumise à d’autres facteurs, il est  possible de coupler cette mesure à d’autres outils.

Anesthésie en hypnose

L’hypnose intéresse de plus en plus le corps médical dans le cadre d’interventions chirurgicales.

Est-ce que l’hypnose remplace l’anesthésie médicamenteuse ?

L’hypnose est utilisée en complément d’une autre anesthésie médicalisée. Elle est un allié efficace pour aider le patient à se détendre, calmer ses angoisses avant d’avoir une anesthésie générale, locale ou régionale et de bénéficier de l’intervention chirurgicale. Dans le cadre d’une anesthésie générale, le patient aura eu l’impression de s’être tranquillement endormi. L’effet potentiellement traumatisant de l’anesthésie générale sur l’esprit est donc fortement atténué.

Le médecin anesthésiste-réanimateur l’utilise également pour faciliter le rétablissement du patient, afin que l’opération lui paraisse moins traumatisante. Les douleurs post-opératoires seront moins importantes et les prescriptions d’analgésiques seront également moins importantes du fait de l’état du patient à son réveil.

L’hypnose est également appréciée par l’équipe médicale, car un patient déstressé facilite ainsi le travail du chirurgien, du médecin anesthésiste-réanimateur ainsi que de l’équipe soignante.

Est-ce que tout le monde peut avoir recours à l’hypnose ?

L’hypnose fonctionne sur tout le monde, à condition que le patient soit ouvert à ce genre de pratique et suggestible, il faut qu’il :

  • coopère totalement avec le médecin anesthésiste-réanimateur pratiquant l’hypnose ;
  • ait confiance en son hypnothérapeute pour faciliter le « lâcher prise » ;
  • soit réceptif à ce genre de pratiques.

Qui peut pratiquer l’hypnose ?

Seul un anesthésiste-réanimateur formé à cette technique peut la pratiquer au bloc opératoire, uniquement à la demande du patient.

De plus en plus de médecins et professionnels de la santé sont formés à l’hypnose pour compléter leur spécialité et prévenir ou soulager la douleur de leurs patients ou d’autres indications (arrêt de tabac, stress, troubles du comportement alimentaire, phobie…). Toutefois, tous les professionnels de santé ne peuvent pas pratiquer l’hypnose, il faut être formé principalement par la pratique.

Crédit photo

Image par fernando zhiminaicela de Pixabay

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